FLORIDE et communauté de biens entre époux

N’ayons crainte de commencer par un poncif, nous vivons dans un monde toujours plus globalisé. Les personnes physiques sont de plus en plus mobiles et entraînent avec elles un tourbillon de questions juridiques ayant trait à leur personne ou à leur patrimoine. C’est l’objet même de tout un pan du droit international que de les solutionner. En la matière, les ÉTATS-UNIS sont un cas particulièrement intéressant en ce qu’il existe des questions interétatiques en leur sein même, entre chaque État qui les compose, et au niveau international, entre un État uni et un État extérieur à cette fédération.

L’on envisagera dans cet article la relation de la FLORIDE avec les autres États fédérés et les États tiers, au sujet du régime de propriété de communauté de biens qui peut exister au sein du couple marié. Au cabinet BOYER, nous avons fait une spécialité des questions de droit international de la famille. Maître Francis M. BOYER est l’un des rares avocats américains à bénéficier d’une certification en droit international.

La propriété au sein du couple marié aux ÉTATS-UNIS

Une idée répandue, notamment en France, est que les États-Unis ne connaissent pas la notion de régime matrimonial et qu’on peut comparer la situation du couple marié américain à la séparation de biens. Si cette idée est partiellement vraie, il existe en réalité différents régimes de propriété des biens aux États-Unis. Il est important de ne pas considérer les États-Unis comme un tout uniforme, car le régime de propriété au sein du couple marié varie selon les États américains. On distingue principalement deux ensembles d’États :

Les États de « Common Law »

Les États dits de « common law », au nombre de 41, dont la Floride, suivent le principe de base selon lequel chaque époux est considéré comme un individu distinct ayant son patrimoine propre. Cependant, ce principe est largement modifié par la jurisprudence, en particulier en cas de divorce (cf. Divorcer en Floride : l’« equitable distribution » des biens).

Les États de « Community Property »

Les États dits de « community property », au nombre de 9 (l’Arizona, la Californie, l’Idaho, la Louisiane, le Nevada, le Nouveau Mexique, le Texas, Washington, et le Wisconsin), ainsi que le territoire de Puerto Rico, considèrent que les époux font partie d’une communauté à laquelle chacun contribue principalement par son travail. Toute acquisition par l’un des époux est réputée faite pour le compte de la communauté, chaque époux détenant 50 % de la communauté.

Bien que la proportion d’États de « community property » soit inférieure à celle des États de « common law », ces derniers représentent plus de 30 % de la population américaine, avec Puerto Rico étant le territoire américain le plus peuplé. Ces États sont très proches d’un régime matrimonial, car la « community property » s’applique aussi bien lors du divorce que du décès de l’un des époux.

L’Importation des Droits de « Community Property » en Floride

La Floride a adopté le Florida Uniform Disposition of Community Property Rights at Death Act, en vigueur depuis le 1er octobre 1992. Selon cet acte, un couple marié établissant son domicile en Floride et venant d’un État de « community property » importe ses droits de « community property », mais uniquement en cas de décès du mariage. Cette importation s’applique également aux couples venant d’États tiers, comme ceux de l’Europe et de l’Amérique latine, qui appliquent un régime matrimonial de communauté.

Il est impossible de contrecarrer ce mécanisme par des dispositions testamentaires ou un trust. Ainsi, comment déterminer ce qui relève de la « community property » ou de l’« equal distribution » ?

Critères de Rattachement

Pour déterminer les droits applicables, deux critères de rattachement doivent être pris en compte :

  • Le domicile du défunt au moment de son décès
  • Le domicile marital

Ainsi, si le dernier domicile du défunt se trouve en Floride, son patrimoine sera par principe analysé selon les règles de l’« equitable distribution ». Toutefois, les biens acquis pendant la période où le domicile marital était situé dans un État de « community property » seront analysés selon les règles de la communauté de biens, indépendamment de l’ancienneté de ce domicile.

L’importation des droits de « community property » en FLORIDE

L’État de FLORIDE a adopté le Florida Uniform Disposition of Community Property Rights at Death Act, entré en vigueur le 1er octobre 1992. Selon les dispositions de cet acte incorporé aux Florida Statutes, un couple marié établissant son domicile conjugal en FLORIDE et en provenance d’un État de « community property », importe avec lui ses droits de « community property », en cas de fin du mariage par décès uniquement. Cette importation se réalise pour tout État américain de « community property » mais aussi pour tout État tiers connaissant un régime matrimonial de communauté, soit toute l’Europe et l’Amérique latine. Il est impossible de faire échec à ce mécanisme par des dispositions testamentaires ou par voie de trust.

Dès lors, comment déterminer ce qui, dans le patrimoine du défunt, relève de la « community property » ou de l’« equal distribution » ? Il convient d’utiliser deux critères de rattachement distincts :

  • Le domicile du défunt au moment de son décès.
  • Le domicile marital.

Ainsi, le patrimoine du défunt ayant son dernier domicile en FLORIDE sera par principe analysé comme relevant de l’« equitable distribution ». Mais tous les biens acquis durant la période où le domicile marital était situé dans un État de « community property » seront analysés selon les règles de cette communauté de biens. Ce mécanisme est fonctionnel quelle que soit l’ancienneté du domicile marital dans un État de « community ».

Règles de base

Les biens meubles (« personal property ») sont communs si :

  • Où qu’ils se trouvent, ils ont été acquis en tant que, ou sont devenus et sont restés, des biens communs en vertu des lois d’un autre État ;
  • Ces biens ont été acquis avec les loyers, les dividendes ou les revenus des biens communs ou les produits de ces biens ou en remploi de ceux-ci ;
  • L’on peut établir la traçabilité depuis la propriété commune.

Concernant les biens immeubles situés en FLORIDE et les immeubles détenus en tant que « tenants by the entirety », les Florida Statutes s’appliquent si :

  • L’immeuble a été acquis avec les loyers, les dividendes ou les revenus, les produits ou en remploi d’un bien qui a été acquis comme, ou qui est devenu et est resté, une propriété commune en vertu des lois d’un autre État ;
  • L’on peut établir la traçabilité depuis la propriété commune.

Afin de déterminer si le Florida Uniform Disposition of Community Property Rights at Death Act s’applique à des biens spécifiques, deux présomptions réfutables doivent être prises en compte (Fla. Stat. § 732.218) :

  • Premièrement, tout bien acquis pendant le mariage par un conjoint alors que le domicile conjugal se trouvait dans un État de « community property » est présumé avoir été acquis comme, ou être devenu et être resté, un bien commun.
  • Deuxièmement, tout immeuble situé en FLORIDE, autre que domicile familial ou les immeubles détenus en tant que « tenants by the entirety », et tout bien meuble, où qu’ils soient situés, acquis pendant le mariage par un conjoint alors que le domicile conjugal se trouvait dans un État non communautariste, avec un titre de propriété qui crée des droits au propriétaire survivant, est présumé ne pas être soumis aux dispositions de la loi.

Lorsqu’une personne mariée décède en étant propriétaire de biens communs, la moitié desdits biens appartient au conjoint survivant et n’est pas soumise aux dispositions testamentaires du défunt ni à la succession ab intestat (i.e. sans testament). Cf. Fla. Stat. § 732.219. L’autre moitié de ces biens est la propriété du défunt qui sera transmise par voie de succession. Toutefois, la moitié desdits biens du défunt ne fait pas partie de la succession réservée au conjoint survivant (« elective estate »).

Un cas d’école ?

Ce mécanisme ne relève nullement du cas d’école. En effet, la FLORIDE est le premier État de relocalisation choisi par les retraités aux ÉTATS-UNIS et le premier État à accueillir l’immigration d’État à État. Ainsi, la potentialité de personnes ayant vécu dans un État fédéré de « community property » est élevée. En outre, la FLORIDE est le premier choix des portoricains, territoire connaissant la « community property ». Elle est aussi l’État où l’immigration est la plus importante et notamment la première destination des sud-américains dont les pays connaissent pour la plupart une forme de communauté.

Il faut savoir que cette réglementation découle d’un acte uniformisé qui a été proposé par un comité de juristes à l’ensemble des États fédérés américains. Par conséquent, les mêmes règles existent dans la majorité des États américains.

Un avocat à vos côtés afin de planifier la transmission

Afin d’organiser au mieux votre patrimoine et d’anticiper votre succession, il est utile de consulter un avocat. Le cabinet d’avocats BOYER est rompu à cet exercice, que ce soit dans un cadre interne ou international.

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